Réveil à 4 heures et demi. Il fait toujours nuit noire, mais je ne tiens déjà plus en place. Anselme préfère attendre qu’il y ait un peu plus de luminosité, ce qui est un peu plus contientieux. Les Japonais ayant dormi dans la hutte se réveillent aussi (ils ont bien dormi les veinards), et préparent leur petit-déjeuner : café chaud ou thé, nouilles et snacks… nous ce ne sera que d’amour et d’eau fraîche ! Une heure plus tard, on décolle, enfin.
Après seulement une demi-heure de marche, on arrive au Jomon Sugi (縄文杉), le plus vieux cèdre (son âge se situe entre 2000 et 7200 ans !). Il me parait pourtant un tantinet moins impressionnant que celui qu’on a vu la veille, ce que je comprendrai bien plus tard : le Jomon Sugi fait 25m de hauteur alors que celui de la veille en fait 35 (étrangement, ces chiffres varient d’un site à l’autre sur Internet).
Notre ferry est à 11h, on ne se traîne donc pas. Anselme est toujours bien blessé ce qui ne nous permet pas de courrir comme au bon vieux temps (voir notre voyage en Chine, en particulier Huangshan et Emeishan!). En tout cas ce n’est quasiment que de la descente, on ne crèvera pas de fatigue aujourd’hui! Mais les distances sur la carte se révèlent une fois de plus très fausses…
Le paysage ressemble de plus en plus à notre matinée d’hier. La forêt de Mononoke est proche… 🙂
Une heure et demi de marche, et on arrive seulement au – finalement très discret – Wilson’s Stump (la « Souche de Wilson », sympa). Il y a 300 ans, un biologiste american aurait coupé ce cèdre afin de l’analyser et de l’introduire au monde. Maintenant, caché sous un amas de végétation, la partie inférieure de son cadavre – le cèdre, pas Wilson – tente de mourir en paix depuis (en ne pourrissant que très doucement en raison de la grande quantité de résine dans les cèdres).
On pensait qu’on serait beaucoup plus loin à ce train là… comment ne pas rater le ferry maintenant ?
On croise nos guides de la veille avec un petit groupe de touristes se rendant au cèdre. On leur rends leurs torches (qui nous auront finalement quand-même assez bien servi), et on en profite pour se rassurer sur le trajet : il faudra tourner bientôt sur la gauche pour continuer dans la forêt de Mononoke et enfin trouver l’arrêt de bus (le seul endroit ou on peut espérer en trouver un, et ainsi rattraper le ferry ! Vu que tout a été minutieusement calculé à l’aide de notre carte pourrie – je la hais ! – la moindre erreur n’est pas envisageable… 😐
On arrive peu a peu dans la forêt « officiel » de Mononoke. Les mousses sont beaucoup plus omniprésentes qu’au-dessus et recouvrent le moindre cailloux et les troncs.
Le chemin rejoint une voie ferrée en bon état. Plus aucun wagon ne passe là, mais je m’amuse à imaginer Doc Wilson transportant son sugi (cèdre), tronçon par tronçon, jusqu’en bas de l’île sur son petit wagon…
On croise un chemin sur la droite. Un petit chemin, qui se faufile, louvoie et grimpe en hauteur. La conclusion à la tentative de déchiffrer les panneaux ne donnent rien de vraiment encourageant à le suivre. Au contraire, ce chemin indique des montagnes et des sommets alors que l’on se dirige vers le bas. Il nous parait logique de continuer… mais ne nous a pas t’on dit de tourner sur la gauche bientôt ?
Ne nous croiseront plus aucun autre chemin, que ca soir sur la gauche ou sur la droite. On croise des grands ponts et d’autres plus petits, il y a bien des bruits dans la forêt, mais personne. On est vraiment seul. On hésite à revenir en arrière, mais c’est vraiment trop loin de revenir sur nos pas, et de tout façon on ne pourrait pas arriver à temps pour le bus (si il existe) et encore moins pour le ferry. Un soupçon d’amertume. La fin de la descente ressemble à l’apogée d’un mauvais bad-trip (je crois honnêtement avoir croisé Tatarigami & co… mais pourquoi pas plutôt la princesse ?). Pour couronner le tout, une pluie sardonique s’abat sur nous… à s’en donner envie de s’essorer la peau au plus vite . Mais au moins, qu’est-ce que l’on se sent vivant !
Finalement, on arrive en loosers épuisés dans un vieux parking. Il y a quand-même quelques voitures, et MÊME un arrêt de bus. J’y cours ! Pour finalement me faire asséner le dernier coup sur la tête du voyage : le seul bus est dans 9 heures ! Une dizaines de minutes plus tard, une voiture de gardes forestiers arrive, et je leur saute dessus : mais impossible de nous prendre et de nous ramener quelque-part, c’est une voiture du gouvernement – qu’ils disent ! La seule solution, d’après eux, et de marcher jusqu’à la cabine téléphonique la plus proche. Il y a quand-même 10km à marcher sur une route, tout ça afin d’appeler un taxi… pas vraiment la motivation pour ça… 😯 …et la par chance, une petite 4×4 déboule. Ceux sont 3 touristes Japonais, dont une Japonaise Tokyoite. Ils nous proposent de nous ramener à Anbo, ce qui n’est pas là ou est notre ferry, mais au moins c’est le bord de l’île ! Parfait. A 11 heures, on arrive. Le ferry est dans 30mn, et il est à 30km… on peut l’avoir non !? Mais pas à pieds… On court donc demander chez le vendeur de scooters si il voit des solutions, et nous appelle un taxi en lui disant de se dépécher. On arrivera au ferry 10mn avant le départ ! Ouf.
On trouve le ferry bien agréable une nouvelle fois. Après s’être repaître, on va pour un petit somme, ma foi, bien réparateur.
On est d’attaque à nouveau et de retour à Kagoshima ! Ou presque. Anselme a toujours une jambe en moins. On se rends dans une pharmacie où j’explique tant bien que mal sa situation (qui n’est pas clair pour moi non plus, il bien l’avouer). Elle lui refile un produit suspect pour 3 trois rien, ce qui marche quasi-instantanément ! L’indéfectible duo peut reprendre sa route, oh yeah !
Après cette aventure, on a vraiment envie de se faire un excellent repas avec les spécialités du coin .
On arrive sur les coups de 4 heures du matin, où l’on demande à une bande de joyeux lurons de nous indiquer le manga-café le plus proche, afin de redormir un peu. Cette fois on choisit un vrai matelas et non pas des chaises massantes ! 1500Y pour un petit bloc, avec PC / Internet et le matelas, jusqu’au matin. Très bien si on fait abstraction des ronfleurs ou des Japonais à l’air suspect. Mazette, quelle journée !